Night at the museum | ft Feargus

Les journées se faisaient de plus en plus courtes, l’automne s’installant doucement sur les terres anglaises. Les arbres commençaient à arborer leurs feuillages rougeoyants et l’humidité pointait le bout de son nez. Cette année, Sigrid voulait tenter quelque chose de différent dans la gestion de ses horaires : elle trouvait plus agréable d’aller voir Urban legend le matin que d’y aller quand la nuit était tombée. Résultats des courses, elle se devait de rattraper ses heures de travail en restant plus tard le soir, ce qui n’était pas très dérangeant en soit. Le seul point noir au tableau et qu’elle devait souvent se hâter de rentrer chez elle pour prendre une douche, histoire de ne pas sentir le poney, littéralement.

Lunettes sur le nez et doigts serrés sur le manche de son pinceau, elle avait passé la plus grande partie de sa journée à peindre avec une grande délicatesse les craquelures d’un tableau de Constable. Le peintre romantique était plus connu pour ses paysages a coupé le souffle, mais aujourd’hui, c’était l’un de ses portraits - moins connus - qui se tenait entre les mains expertes de la rouquine. Après avoir passé de nombreux jours à retirer les couches de vernis protectrices ternies par le temps, Sigrid avait envoyé un échantillon au laboratoire et avait reçu les résultats début de semaine. Avec grand bonheur, elle avait pu enfin sortir ses pigments et préparer sa peinture pour venir repeindre, touches par touches. Au fur et à mesure de ses avancements, elle consignait toutes les modifications et ajustements qu’elle réalisait, dans un petit carnet. Le document suivrait la peinture jusqu’à ses prochaines restaurations, venant indiquer les solvants et pigments utilisés.  

La fin de journée approchait doucement et les portes du musée étaient fermées depuis plusieurs heures maintenant. Le studio était vide, le silence uniquement ponctué par le souffle et les quelques murmures de Sigrid qui se parlait à elle-même. Les lombaires en compote, la rouquine venait de se rendre compte qu’elle avait complètement oublié de s’étirer durant la journée… Ça lui apprendrait à vieillir, tient. Elle avait posé son pinceau avant de s’étirer douloureusement.

À cette heure-ci, il avait bien peu de monde qui restaient au musée. Peut-être M. Salazar était-il encore dans les bureaux, mais Sigrid en doutait. Une chose était sûre, Feargus, le gardien de nuit, serait là. Depuis qu’elle travaillait un peu plus tard le soir, elle croisait ce vieux monsieur. C’était quelqu’un de fort sympathique et tout comme la jeune femme, il avait une passion pour les discussions sans fin. Si elle remontait le couloir, elle avait peut-être une chance de croiser le gardien nocturne de Rotunda. Marcher - ou boire un thé ou un café - avec Feargus l’aiderait probablement à se dégourdir les jambes et elle ne disait jamais non à un peu de parlotte. Après tout, ça faisait au moins une heure qu’elle parlait avec une peinture qui ne lui répondait pas.

Elle avait passé la tête dans le couloir avant de s’élancer, cherchant des yeux le presque retraité. Sigrid espérait qu’il traînait dans les parages et qu’elle n’allait pas déclencher une alarme quelconque, ce qui serait vraiment stupide de sa part. « Feargus ? Vous êtes là ? »