Portrait de famille | Archibald, August & Charles

2 participants
Reginald Wright
aucune suspicion

Reginald Wright

saisons : La célébration de ses 68 ans se fera en Novembre
occupation : Rentier à la rente de plus en plus basse, il organise séminaires et séjours de luxe dans son manoir, et est membre impliqué de l'organisme The English Heritage Trust pour la sauvegarde des monuments anglais
myocarde : Jamais marié, coeur fermé, solitude poisseuse qui le hante. Le placard est en chêne massif, et quelqu'un a perdu la clef.
faciès & artiste : stanley tucci - self
victimes : 12


portrait de famille

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Family reunions: where toxicity dresses up as concern and love


Le manoir n'était pas souvent aussi bruyant, sauf peut-être lors de l'occasionelle visite de touristes américains. L'occasion était exceptionnelle, et cela expliquait les chambres remplies, les cris d'enfants, le son des pas sur le parquet à travers toute la demeure, le staff employé pour l'occasion, et les aboiements d'un chiot surexcité. Cela ne faisait même pas vingt-quatre heures que tout le monde était arrivé, et Reginald priait déjà pour un prompt départ. Lui-même se serait éclipsé à l'anglaise depuis bien longtemps si ce n'était pas sa demeure où la réunion de famille se déroulait, et son anniversaire qui était célébré. Il se consolait avec le fait qu'Archibald, la jambe en plâtre, incapable de se transporter sans béquilles, était lui aussi coincé là. Au moins il savait qu’il n’était pas le seul à souffrir.

Reggie, le pas preste, traverse la demeure, souriant poliment aux cousins qu’il n’avait pas vu depuis une éternité, esquivant leurs enfants dont il ne connaissait que le nombre car c’était lui qui devait aligner la douloureuse facture de leur présence, flattant la tête du chiot qu’on lui avait offert, dont le nom était encore en débat (seule petite lumière dans ces trois longs, très longs, jours) et arrivé à sa destination, posa une main sur l’épaule de sa mère, qu’on avait roulée dans un coin du salon, près de la cheminée. Autour d’elle désormais, ses deux fils, ses deux petits-enfants, sa bru et l’intégralité de ses arrières-petits-enfants. Presque un portrait de famille heureux. Sauf que nous parlons des Wright (... et Darling), ce qui tue dans l’oeuf le portrait, qui ne serait que faux. Ils faisaient de leur mieux, parfois, mais ces vieilles familles anglaises avaient laissé le bonheur se flétrir avec l’âge de leur aristocratie.

“Mère, Penelope, les enfants, je vous emprunte fils, époux,  père et mère, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.” Politesse passée, il se tourne vers les concernés, Charles, August et Archibald. “Dans mon bureau, nous devons discuter de quelques affaires.” En vérité, la liste est longue, et il ne leur laisse pas réellement le choix. Il y a beaucoup à dire et à faire avec le coeur de la famille. Il aurait pu inclure sa mère, mais elle est trop âgée et fatiguée pour ces affaires. Il aurait pu y inclure la femme de Charles, mais il n’a confiance en personne d’autre qu’elle pour empêcher les cousins de détruire le manoir pendant qu’il est occupé. Il aurait pu inclure les enfants, les aînés au moins, mais pas encore. Que le poids des affaires de la famille ne tombe pas déjà sur leurs épaules. Ils ont le temps.

Son bureau est un étage plus haut. Il aurait pu choisir un endroit plus pratique étant donné l’état de son frère, mais que cela lui serve de punition. Archie connaissait ses torts, combien même refusait-il de les admettre, et Reginald avait toujours été très doué pour lui rappeler la conséquence de certains actes de manière presque vicieuse, mais toujours aisée à nier.
Une fois toute la présente compagnie installée dans son office, il prend le soin de fermer la porte, à clef, pour éviter toute intrusion (ou sortie sur le coup des nerfs) tant que les sujets à aborder ne l’auront pas été, clairement et dans leur entièreté. Il prend place derrière son bureau, restant debout, en position presque de chef de famille, là où son père se tenait quelques décennies plus tôt. L’idée de ressembler à Walter Wright le ferait presque frissonner, il en était pourtant le portrait craché, mais au moins leur père savait maintenir ses affaires en ordre, contrairement à Archibald, alors le copier sur ce point était la chose à faire. “Nous avons beaucoup à échanger, alors essayons de garder nos émois attachés.” Averti-t-il en préambule, le regard sur son frère. Cela n’allait pas être une partie de plaisir.


Archibald Darling
légère suspicion

Archibald Darling

saisons : Grand-père presque gâteau, retraité débordé, vieillard "l'âge c'est dans la tête". (80ans)
occupation : Retraité bien mérité après avoir présidé un journal financier londonien.
myocarde : Veuf depuis huit mois, il ne porte déjà plus le noir et on peut le voir de retour à ses mauvaises habitudes, l'impunité en plus.
miroir : Portrait de famille | Archibald, August & Charles 73d15186b3d64c36a4a4ffbb4341fb89
faciès & artiste : Charles Dance (sarah)
victimes : 117


portrait de famille

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Family reunions: where toxicity dresses up as concern and love


Pierce, sept ans, écoute, fasciné, son grand-père qui lui explique comment il a récupéré son plâtre. C’est une histoire extrêmement intéressante avec moult rebondissements, des personnes décrits en détail et, comme toute bonne histoire, est bien entendu fictive. Lawrence, quatorze ans, l’expliquera plus tard à son petit frère avec un petit roulement d’yeux suffisant : « Papi il raconte que des âneries, c’est Papa qui le dit. » Heureusement pour Pierce et pour Archibald qui s’amuse sûrement plus que son petit-fils, ce moment n’est pas encore arrivé.
Pierce, en plus de l’éminente et incroyable mission d’écouter la parole d’évangile qui sort de la bouche d’Archibald, a celle de l’aider à nettoyer son plâtre. Ils ont tout les deux de quoi râcler et ils viennent effacer ce que les cousins aux trop de degrés sont venus écrire sur la jambe fraichement blanche du vieil homme.
— La vérité, mon petit, c’est qu’ils aiment plus écrire sur du plâtre qu’admirer leur œuvre par la suite. Cela ne les blessera pas du tout et, moi, je n’aurai pas l’air d’un pitre quand je reviendrai au sein d’une société acceptable.
Pierce s’en va donc à s’interroger sur la société acceptable, et pourquoi ils ne le sont pas, et si lui il peut aussi faire un dessin sur le plâtre une fois qu’on aura tout retiré. Et Archibald lui aurait fait l’honneur d’une extrêmement longue explication sur tous les défauts de tous les membres de la famille invités dans sa maison d’enfance quand il se fait convoquer. Le mot est fort mais, vraiment, aucun autre ne pourrait qualifier la façon dont ils se font appeler par le maître de la maison, Reginald Wright lui-même.
Reginald fait son annonce et, avec de gros yeux, Archibald dit avec beaucoup sérieux à son cher Pierce :
— Nous, par contre, on ne peut pas dire qu’on y voit un inconvénient. Tu vois comme la vie est dure quand on est adulte, mon cher monsieur Pierce Darling ? Fais très attention à ne pas vieillir, c’est une terrible erreur.
Il faut ensuite bouger.
Archibald, valide, est déjà du genre à prendre de la place dans une pièce. Blessé, et cela n’est pas la première fois que cela arrive, il devient absolument omniprésent. Il y a un grand soupir pour se relever, il y a son fils à qui on demande de saisir les béquilles, sa fille dont on prend le bras, sa mère à qui on assure que tout va bien, sa belle-fille qu’on supplie de bien vouloir échanger de place. Penelope est, heureusement, habitué aux histoires de son beau-père et ne fait que rire avec lui sans bouger de sa juste place loin du bureau de Reginald.
Ah, les sales souvenirs que ça fait remonter.
— Vous avez remarqué comme ce genre de discussion ne peut jamais avoir lieu dans un endroit agréable ? demande-t-il à ses enfants pendant qu’ils sont forcés à ralentir pour s’adapter à son rythme dans les escaliers. Au coin de la piscine, devant un thé au milieu d’un jardin de roses, ou bien avec un bon vin et un cigare.
Non, il faut le bureau lugubre de Walter Wright avec le visage tout aussi lugubre de Reginald Wright en personne. Archibald occupe l’espace d’autres commentaires alors que Charles l’aide à monter, chacun une béquille à la main. Archibald fait une remarque sur le nombre de marches, qu’il a compté, et plusieurs fois, dans sa jeunesse. Il fait une remarque sur son frère qui a eu la loyauté de ne pas changer le nombre de marches ce que, lui, s’il avait récupéré la maison, aurait fait. Tout le monde sait qu’Archibald déteste cette maison et n’en aurait jamais voulu s’il avait été payé pour la posséder.
Installés dans le bureau, Reginald va se dresser comme s’il était en train de poser pour une peinture pendant qu’Archibald trouve le confort du fauteuil le plus confortable que la pièce dispote. Un large soupir lui échappe pendant que Reginald s’en va à parler d’émois.
— August, dear, pourrais-tu amener un coussin à ton vieux père ? Il en a besoin pour garder ses émois attachés.
Il daigne offrir à son petit frère un signe de la main encourageant, l’invitant à poursuivre.


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It is "Sir" Darling.